Les managers le pressentaient depuis des mois, deux enquêtes réalisées par l’Ifop pour le compte du groupe de protection sociale Malakoff-Humanis, l’ont confirmé : la crise sanitaire a eu des effets délétères sur la santé mentale des salariés français. Désormais deuxième motif des arrêts de travail, les risques psychosociaux (RPS) deviennent une priorité des actions de prévention des employeurs.
Avec son cortège de contraintes et son climat d’incertitude, la crise sanitaire, a durablement éprouvé le moral des salariés français.
Les RPS, second motif d’arrêt de travail
Comme l’a relevé une première enquête réalisée par Malakoff-Humanis, lors du confinement, les risques psychosociaux (RPS) sont devenus le deuxième motif des arrêts de travail devant les troubles musculo-squelettiques (TMS), la première place étant évidemment détenue par les effets directs de l’épidémie. Les RPS représentaient ainsi 11 % des arrêts en mars, 9 % en avril, 12 % en mai et toujours 11 % en juin.
Selon cette étude, l’impact de la pandémie sur l’état psychologique des salariés devrait hélas perdurer. En effet, l’appréhension du retour en entreprise manifestée pendant le confinement s’est confirmée au mois de juin. Elle concernait alors 60 % des salariés. Parmi les raisons les plus fréquemment évoquées pour expliquer cette appréhension, la mutuelle a identifié “l’application des mesures sanitaires (34 %), la reprise d’un rythme de travail ordinaire (27 %), le changement d’organisation du travail par rapport à l’avant confinement (23 %), la reprise des transports en commun (16 %, et jusqu’à 36 % en région parisienne)”.
45 % des salariés “psychologiquement plus fatigués”
Une seconde enquête, réalisée au cœur de l’été par le groupe de protection sociale auprès des salariés du secteur privé, démontre que les effets psychologiques de la crise sont profonds. En effet, 45 % d’entre eux affirment se sentit psychologiquement plus fatigués. Pour expliquer cette fatigue, des aspects personnels sont bien sûr à prendre en compte : 33 % des salariés confient que leur entourage a été une source d’inquiétude ou de stress plus forte qu’avant la crise, et plus particulièrement les aidants et les salariés malades. Toutefois, les motifs professionnels ont aussi toute leur place dans cet état psychologique dégradé.
La crise sanitaire a en effet renforcé les facteurs traditionnels de risques psychosociaux. L’intensité du travail, l’insécurité de la situation professionnelle et la mauvaise qualité des rapports sociaux – soit trois grands facteurs de risques psychosociaux – se sont dégradées depuis le début de la crise. Ainsi, “33 % des salariés estiment que leur travail est plus intense depuis la crise (vs 12 % qui estiment qu’il l’est moins qu’avant la crise). 23 % pensent qu’il empiète davantage sur leur vie personnelle (vs 13 %), et 14 % qu’ils subissent plus de tensions au travail (vs 3 %)”. Enfin, facteur supplémentaire d’anxiété, 20 % des salariés disent “avoir plus peur de perdre leur emploi depuis la crise” (vs 3 %).
Prévenir les RPS pour surmonter le seconde vague
Dans ce contexte difficile, quelque 85 % des salariés saluent la mobilisation de leurs entreprises pour protéger leur santé, 78 % déclarant que leur entreprise a adapté l’organisation du travail aux enjeux de protection de la santé. On peut toutefois considérer que cette bonne opinion porte essentiellement sur les mesures prises pour éviter leur contamination. En effet, s’agissant de la santé mentale, leur jugement est plus mitigé car 57 % estiment “ne pas avoir été suffisamment accompagnés sur le plan psychologique”. Plus qu’une récrimination, il s’agit d’une requête que les entreprises devraient entendre en se préoccupant d’abord des salariés les plus fragilisés.
À cette fin, les outils existent pour agir. Sur le plan collectif, un diagnostic RPS – obligatoire dans le cadre de l’élaboration du Document unique des risques professionnels (DUER) – peut permettre d’identifier les principaux facteurs de RPS présents dans l’entreprise. Enfin, de façon plus immédiate, les employeurs peuvent aussi proposer différentes modalités d’accompagnement psychologique aux salariés qui en ressentent le besoin. Alors que notre pays est confronté à une seconde vague épidémique, il ne fait pas de doute que ces mesures permettront aux entreprises et à leurs salariés de mieux relever ce nouveau défi dans les meilleures conditions.