Syndrome de tako tsubo : le travail est aussi une affaire de cœur

Dans un ouvrage à paraître le 27 septembre prochain, la journaliste Danièle Laufer décrit la façon dont elle a été victime d’un tako tsubo ou “syndrome du cœur brisé”. Signe des temps, elle estime que cette pathologie découverte dans les années 80 par des chercheurs japonais trouverait désormais un terrain propice dans le monde du travail.

“Après le burn-out (consumation par excès d’investissement), le bore-out (exténuation par l’ennui) et le brown-out (anéantissement par la perte de sens), le tako tsubo ­intègre cette saison la longue liste des menaces plus ou moins diffuses pesant sur l’open space”. C’est ainsi qu’un récent article du Monde présente l’ouvrage que la journaliste Danièle Laufer consacre au tako tsubo.

Initialement, le tako tsubo n’est pourtant pas spécifiquement lié au travail. “La maladie de tako tsubo survient à la suite de traumatismes psychologiques importants. Ainsi elle a été découverte par un chercheur japonais qui s’est rendu compte que les différents symptômes qui la caractérisent, survenaient après des perturbations psychiques ou psycho-affectives graves”, précise le Vulgaris médical.

Concrètement, ce syndrome exotique se manifeste de la façon suivante. Après un choc émotionnel grave, le trop-plein de stress provoque une dilatation du ventricule cardiaque gauche qui prend alors la forme d’un tako tsubo, autrement dit d’un piège à poulpe japonais. Comme le précise Le Monde, “le cœur ­retrouvera au final sa forme normale, mais cet épisode traumatique laisse ­exténuée la personne qui en a été ­ victime, donnant à penser qu’elle vient de subir un infarctus”.

Le choc émotionnel déclencheur peut bien sûr être de diverses natures. Les chercheurs japonais évoquent ainsi le cas de personnes ayant développé un tako tsubo suite à des catastrophes naturelles. Mais le cas de Danièle Laufer laisse penser qu’il peut aussi résulter d’une violente émotion de nature professionnelle. C’est en effet à la suite d’une violente altercation avec une collègue qu’elle a, elle-même, développé un tako tsubo.

Comme le relate Le Monde, dans l’ouvrage de Danièle Laufer, “la vie au bureau, sur ­laquelle on projette volontiers une forme d’idéal et de réalisation de soi, est envisagée sous l’angle de l’amour déçu. Dans une période où avoir un travail fait figure de privilège, le ressentiment accumulé au fil d’années de labeur insatisfaisant devient difficile à verbaliser et conduirait à cette phase de décompensation physique aussi inattendue que violente”.

Certains seront peut-être agacés de voir ainsi la vie professionnelle assimilée une nouvelle fois à une pathologie (notre Président lui-même n’avait-il pas déclaré qu’il “n’aime pas le terme de pénibilité […] parce qu’il induit que le travail est une douleur” ?), d’autant qu’il n’existe pas à ce jour de données épidémiologiques permettant de faire du tako tsubo une pathologie professionnelle à part entière.

Toutefois, si subjectif soit-il, le récit de Danièle Laufer a le mérite de rappeler une vérité bien établie : le travail n’est pas seulement un moyen de subvenir à nos besoins, il est une activité dans laquelle on met du cœur à l’ouvrage, autrement dit dans laquelle on s’engage physiquement mais aussi affectivement et psychiquement. D’où la nécessité de prêter attention aux risques psychosociaux, non pour mettre le travail en accusation, mais pour faire en sorte que chacun en tire le meilleur.

Pour aller plus loin :

Le Tako Tsubo. Un chagrin de travail, par Danièle Laufer (à paraître le 27 septembre), Les Liens qui libèrent, 160 pages, 15 €

“Quand l’open space brise le cœur”, Le Monde, 28/08/17.

Expedita