À l’occasion de la Semaine de la Qualité de vie au travail (QVT), Impact Prévention propose une série d’éclairages sur cette démarche novatrice. Le troisième volet de cette série souligne combien la QVT, loin de reposer sur une série de normes figées, traduit une démarche de progrès continu à poursuivre librement dans le temps.
Longtemps, la prise en compte des questions de santé et de sécurité au travail a reposé sur la prescription de normes et de règles formelles à respecter par les entreprises dans une logique de simple “protection”. Comme le rappelle Hervé Lanouzière, inspecteur des affaires sociales et ancien directeur de l’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail (Anact), cette approche “se traduisait par la parution de nombreux textes réglementaires, de nature technique, énonçant des obligations de moyen précises. Elle reflète une approche dans laquelle à chaque risque, considéré isolément, est associée une solution technique”.
De la protection contre les risques à la prévention des risque
Or, même si cette façon de faire a permis une baisse significative des accidents du travail, elle a, simultanément montré ses limites. En effet, dans ce cadre, les pathologies résultant de la conjonction de plusieurs causes peinaient à être identifiées et donc prévenues. C’est pourquoi, à compter des années 70, la législation va progressivement promouvoir une forme plus proactive de la prévention des risques qui trouvera une traduction éclatante avec, d’une part, l’obligation, pour les employeurs, de réaliser et mettre à jour un Document unique d’évaluation des risques (DUER), d’autre part avec l’avènement, au même moment, d’une obligation de sécurité de résultat confirmée par la jurisprudence.
Il s’agit d’un profond changement de paradigme. “Avec cette évolution, note Hervé Lanouzière, la santé au travail n’est définitivement plus un état de conformité stationnaire que l’on pourrait atteindre une fois pour toutes en instaurant des consignes et des procédures qu’il n’y aurait qu’à respecter. Il ne suffit plus de se conformer à ce que prescrivent les textes. L’amiante est passé par là : il faut anticiper, se placer dans une logique d’amélioration constante, être proactif, se tenir informé, chercher à substituer, etc.” En effet, à compter de ce moment, la prévention des risques devient dynamique, l’entreprise n’étant plus appelée à seulement se conformer à des règles imposées de l’extérieur mais à déployer, en son sein, une démarche de progrès continu
De la prévention des risques à la promotion de la santé
D’une logique de conformité sous contrainte, on passe à une logique de libre créativité qui trouve précisément sa plus parfaite expression dans le concept de Qualité de vie au travail (QVT). En effet, après la “protection” et la “prévention”, la QVT fait rentrer l’entreprise dans l’ère de la “promotion” de la santé au travail. “Promouvoir la santé, c’est aller encore au-delà de la prévention des risques, qui reste encore très techno centrée. C’est comprendre que les déterminants de la santé au travail prennent racine dans l’organisation du travail et les relations sociales, incarnés dans les projets structurants de l’entreprise. C’est donc intégrer les conditions de travail dans les paramètres décisionnels de l’entreprise afin que ces décisions portent leurs fruits tant sur le plan de la performance économique que de la santé au travail”, explique Hervé Lanouzière en précisant combien cette évolution a été rendue nécessaire par l’émergence croissante des risques psychosociaux.
Ce caractère dynamique de la QVT se retrouve d’ailleurs dans le titre choisi pour désigner l’Accord national interprofessionnel (ANI) du 19 juin 2013 : “Vers une politique d’amélioration de la qualité de vie au travail et de l’égalité́ professionnelle”. De la sorte, il est bien spécifié que la QVT est bien un processus dynamique et progressif, une direction à suivre, un chemin à parcourir collectivement par les membres de l’entreprise, davantage qu’un état à atteindre. C’est du reste la raison pour laquelle les entreprises qui s’engagent sur cette voie sont vivement encouragées à se doter d’un outil de suivi de la qualité de vie au travail. À l’instar de ce qui se fait avec la mise à jour du DUER, cet outil permet ainsi d’évaluer les actions déjà accomplies et d’en programmer de nouvelles dans une dynamique de progrès continu au service de la performance globale de l’entreprise.